L’année garibaldienne se termine le 4 juillet 2008, l’heure de rendre des comptes a sonné...
Curieuse année du bicentenaire de la naissance de Garibaldi en vérité, dans sa ville natale qui plus est. On se souvient que ce bicentenaire avait mobilisé le Comité Populaire créé par la L.R.L.N. Le 4 juillet dans l’après-midi, il avait organisé une cérémonie devant la sépulture de la mère de Garibaldi au cimetière du Château. Le soir, le Comité avait reçu l’arrière-petit-fils de Garibaldi (unique descendant direct masculin à porter encore ce nom) qui est conservateur de la maison-musée de Garibaldi à Caprera et le seul autorisé par l’Etat italien à y résider. Le matin, il assistait avec son épouse à une cérémonie officielle au sénat de Rome, mais ils avaient tenu à venir le soir à Nice, avec le peuple niçois, comme en famille. Une gerbe avait été déposée devant le monument du héros puis, à la nuit, des bouquets avaient été jetés dans le bassin du port Lympia par Giuseppe Garibaldi et Alain Roullier, sur le site où jadis se trouvait la maison natale du héros, pendant que la foule, d’une seule voix et spontanément, entonnait Nissa la Bella. Un long cortège aux flambeaux était ensuite remonté par la rue Ségurane devant le monument, et la foule des anonymes, des sincères, a illuminé la statue de mille petits lumignons, évoquant l’expédition des Mille. L’instant était magique et demeurera marqué à jamais dans l’esprit de ceux qui l’ont vécu. Mme Flavia Garibaldi qui, depuis l’aube, avait eu une journée des plus chargée, devant cet extraordinaire spectacle et la chaleur de l’accueil des Niçois avait dit alors : “Ce soir à Nice efface les fatigues de ce matin à Rome…”
D’autres le fêtèrent d’une autre façon. Des professionnels avaient confectionné un stockfisch, certains, pour honorer Garibaldi qui méprisait l’argent, l’avaient transformé en marque de fabrique et vendaient un label… Plus tard, les historiens qui se pencheront sur le sujet auront du mal à le croire, et pourtant les preuves sont là ; bien avant l’année du bicentenaire, certains avaient déjà déposé un éventail de noms de “marques” pour s’en assurer une utilisation commerciale exclusive, ainsi qu’un “label” sous l’incroyable prétexte que “ce label était destiné à garantir une utilisation commerciale du nom du héros niçois, conforme aux traditions garibaldiennes” ! Associer le nom de Garibaldi à “une utilisation commerciale” et se prétendre juges “des traditions garibaldiennes” est évidemment un non-sens et une hérésie qui a dû faire retourner Garibaldi dans sa tombe. Le “Comité” négociait le fameux label, sous diverses conditions d’utilisation à hauteur de 15 000 euros, 3 000 euros, ou “à négocier”. Garibaldi qui vécut et mourut dans une pauvreté spartiate n’aurait certainement pas apprécié d’être honoré d’une telle façon et moins encore dans sa ville natale.
Le 20-02-2004, M. Gérard Coletta, mandataire de la SARL Serre, déposait à l’INPI (Institut nationale de la propriété industrielle) la marque commerciale “1807 Garibaldi 2007” ;
Le 10-05-2004, M. Christian Gallo, mandataire du “Comité pour l’organisation des fêtes de la naissance de Giuseppe Garibaldi” déposait à l’INPI les marques commerciales suivantes : “Bicentenaire Garibaldi”, “Garibaldi 1807-2007”, “Nice-Garibaldi”, “Viva Garibaldi” et “Garibaldi 2007”.
Le 16-08-2004, M. Jean-Pierre Mangiapan, mandataire du “Comité pour l'organisation des fêtes du bicentenaire de la naissance de Giuseppe Garibaldi”, déposait, lui, la marque “Année Garibaldi”. Tous ces noms promus “marques de fabrique” étaient censés être réservés exclusivement aux déposants, pour les activités commerciales.
Tous ces dépôts de marques s’étendaient à diverses utilisations (18 lignes d’énumération) allant de la fabrication “d’adhésifs pour la papeterie et le ménage” à “la location de temps publicitaire sur tous moyens de communication”, à “l’organisation d’expositions à buts commerciaux” jusqu’aux “services de jeux proposés en ligne”. Ce véritable trust donne le vertige. Le descendant du héros, Giuseppe Garibaldi, outré, avait adressé une lettre ouverte aux Niçois, pour protester contre l’utilisation à fins commerciales et exclusives du nom de son ancêtre, chose que jamais la famille Garibaldi n’avait jamais faite elle-même, précisant hautement que ce nom appartenait à tous ceux qui agissaient dans la ligne morale du héros, mais à personne en particulier. Rappelons que le Conseil d’administration de l’association “propriétaire” de ces marques commerciales est composé de M.M. Jean-Pierre Mangiapan, conseiller général, Gérard Coletta, des éditions Serre, Gaston Franco, conseiller général, Christian Gallo, qui anime le site “Ficanas” sur le Web, à moins que ce soit un homonyme (le nom du site est d’ailleurs lui aussi “déposé” alors que Le Ficanas était un ancien et célèbre journal niçois et non la création du déposant), René Guiglielmetti, Roland Mayolini, Daniel Godard, Pierre Botticelli, restaurateur, Jean-Marc Giaume, président de la “Fédération des associations du comté” et actuel chargé du Patrimoine à la mairie de Nice, Denis Léandri, René Orazem, Roger Rocca, du Sourgentin, Jérôme Vandamme et Hubert Heyries, qui justement publia un ouvrage sur Garibaldi aux éditions Serre, lequel était frappé du logo du Comité.
Le bicentenaire excitant également les “chasseurs de subventions” patentés, des voix s’élevèrent dans le public pour protester et demander des comptes. Le bruit courait que certains responsables d’associations subventionnées s’étaient salariés, qu’ils faisaient des voyages, achetaient du matériel… à la santé de Garibaldi et avec l’argent public octroyé pour lui rendre hommage. Pour répondre à ces rumeurs, plus que dérangeantes, M. Mangiapan avait déclaré : “si le Comité doit gagner de l’argent grâce à ce label, ce qui n’est pas encore le cas, la somme pourrait être versée à une fondation Garibaldi […] le Comité sera dissous le 4 juillet 2008, les fonds seront alors reversés à une fondation.” Dans moins d’un mois, l’heure sonnera donc de donner des comptes plus précis sur les ventes de ce label, et l’affectation des fonds.
Le Conseil d’administration du “Comité” compte quinze fanatiques de Garibaldi, au point de vouloir lui assurer une immortalité qu’il a déjà en plaçant sous ses auspices jusqu’à la fabrication “d’adhésifs pour la papeterie ou le ménage”.
Parmi eux se trouve le président de la “Fédération des associations comté de Nice”, qui est actuellement en charge du Patrimoine à la mairie de Nice. Or, le fameux label a été utilisé par la Ville de Nice, la Région PACA, le Conseil général des A.-M… M. Estrosi ayant déclaré lors de sa campagne électorale qu’il veillerait, s’il était élu, à une parfaite transparence (et de surcroît il avait fait signer à ses colistiers une charte indiquant qu’une simple indélicatesse de l’un de ses conseillers municipaux et à plus forte raison de ses adjoints, serait immédiatement sanctionnée par un renvoi), il aura à cœur, afin de faire taire les rumeurs, de demander à son chargé du Patrimoine de fournir des comptes exacts sur la perception et l’utilisation de fonds publics afin de ne pas donner prise aux suppositions, fondées ou non, qui naissent toujours d’une situation non éclaircie. Les questions sont simples : La “Fédération des associations du comté de Nice” dont M. Giaume est président a-t-elle encaissé des subventions d’organismes publics pour l’organisation des fêtes du bicentenaire de Garibaldi et si oui, quel en a été l’usage exact ; le cas échéant, seule la publication de la comptabilité de l’association pourrait rassurer les Niçois et éteindre les rumeurs. Le “Comité international pour le bicentenaire de Joùsé Garibaldi”, qui compte M. Giaume au sein de son Conseil d’administration, a-t-il perçu de collectivités publiques des subventions directes pour le bicentenaire, ou a-t-il vendu à des collectivités publiques l’autorisation d’utiliser son label ; et si oui, quel a été l’usage de ces fonds publics, comptabilité à l’appui et publiée.
Précisons qu’il n’est nul besoin de suspicion pour demander des comptes sur l’emploi des fonds publics, puisque les élus sont tenus de les fournir aux contribuables. Cette légitime demande d’informations n’est nullement vexatoire, elle protège au contraire les intéressés des malveillants et des sceptiques en clarifiant la situation. Mais si les élus intéressés ne fournissent pas eux-mêmes ces informations, il est légitime que les contribuables leur rappellent qu’ils doivent le faire. D’autant que de réelles suspicions se feraient jour, s’ils ne le faisaient pas. Attendons donc le 4 juillet prochain. Si à la rentrée, les comptes retraçant l’utilisation des subventions publiques octroyées pour organiser le bicentenaire, à des associations dirigées par des élus, n’étaient pas fournis et publiés, le maire de Nice sera sûrement très sollicité par les électeurs pour qu’il intervienne auprès de son chargé du Patrimoine et exige la publication des comptes. Cela évitera que cette mandature municipale ne commence par de regrettables zones d’ombres sur l’action de certains conseillers municipaux de la majorité en charge de responsabilités, alors que le candidat Christian Estrosi promettait aux Niçois une lumineuse clarté.