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3 février 2014

Hommage de Jean de Pingon à Alain Roullier-Laurens

La Ligue pour la restauration des libertés niçoises est orpheline. Son fondateur, Alain Roullier-Laurens s'en est allé. Nous savons tous ce que nous avons perdu en perdant Alain, nous savons tous ce que Nice et la Savoie ont perdu, mais si nous regardions plutôt ce que nous avons gagné grâce à lui, ce que Nice et la Savoie ont gagné et ce que l'Histoire lui doit.

En douze ans Alain a fait naître un espoir que jamais personne n'aurait osé formuler avant lui: l'espoir d'inscrire à nouveau Nice dans l'Histoire en la libérant du joug de la puissance annexante, en chassant à jamais les institutions françaises hors du territoire niçois. Voilà bien qui pouvait paraître totalement insensé à plus d'un. C'est que les gens ont la mémoire courte et qu'un siècle et demi de francitude a effacé chez beaucoup les siècles glorieux que Nice a connu sans la France. Pourtant une seule journée a suffi pour effacer les doutes et affirmer les convictions; ce fut la journée du 24 mars 2010, journée de la Déclaration de Genève.

L_appel_de_Gen_veCe jour-là, Alain Roullier-Laurens et moi-même, tous deux accompagnés par des délégations de Niçois et de Savoisiens, nous avons écrit à Genève une page d'Histoire. Cent-cinquante ans exactement après l'annexion de Nice et de la Savoie par la France, nous avons révélé que la France n'avait pas rempli ses obligations internationales pour conserver les territoires annexés de Nice et de la Savoie. Cela nous valu une réponse du Gouvernement français qui déclara aussitôt qu'il pouvait encore remplir ses obligations internationales et qu'il s'en acquitterait dans les meilleurs délais. Le 25 décembre 2012, j'annonçais aux Niçois et aux Savoisiens que l'Organisation des Nations Unies avait débouté la France de sa demande en refusant d'enregistrer le Traité d'annexion du 24 mars 1860. Une semaine plus tard, le Gouvernement français reconnaissait cet échec en tentant, pitoyablement de le justifier, prétendant que sa démarche, effectuée avec 63 ans de retard, n'était finalement pas obligatoire!

Plus sérieusement: si le Secrétariat des Nations Unies a refusé d'enregistrer ce Traité, c'est parce qu'Alain et moi-même lui avions fait parvenir un mémoire qui montrait, preuves à l'appui, qu'il n'avait pas été notifié à l'Italie dans les délais prescrits par le Traité de paix du 10 février 1947. Or, selon les termes de ce Traité, ce défaut de notification entraînait automatiquement l'abrogation. Voilà pourquoi le Traité d'annexion du 24 mars 1860, unique source de légitimité des institutions françaises à Nice et en Savoie, est à présent définitivement abrogé!

Cette formidable victoire nous la devons en très grande part à Alain Roullier-Laurens, non seulement pour ses recherches qui jointes au miennes et à mes démarches onusiennes, ont permis cet aboutissement, mais surtout pour sa détermination à rendre la chose publique et à l'inscrire dans l'Histoire grâce à la démarche solennelle qu'a constituée la Déclaration de Genève.


Sans le soutien d'Alain, je n'aurais jamais organisé cette démarche. C'est pourquoi ce jour-là Alain n'était pas un invité à Genève, mais le principal protagoniste de cette journée historique où la renaissance de Nice et de la Savoie s'est enfin inscrite dans le droit international. J'ai récemment rendu public un texte sur la spécificité du territoire savoisien dans l'espace français. Il est encore une spécificité que je n'avais pas évoquée: la Savoie, qui a connu un passé d’État européen, a été annexée à huit reprises par la France. Par sept fois, la Savoie s'est désannexée! A chaque fois ce fut à l'occasion de difficultés traversées par la puissance annexante. Ces multiples désannexions montrent assez que la Savoie n'a pas vocation à demeurer française.


Dans la conclusion de mon ouvrage sur l'annexion, paru en 1996, j'annonçais le déclin puis la chute de la France, république sclérosée incapable de se réformer car à jamais figée dans des institutions obsolètes. Les temps viennent et bientôt le paquebot France ira par le fond. Je me réjouis de ce prochain naufrage car nous ne manquerons pas de saisir l'occasion pour affirmer nos droits et restaurer la souveraineté savoisienne, ainsi que nous l'avons déjà fait par le passé. Le temps de la huitième désannexion approche. Celle-ci sera définitive car le droit des peuples a à présent triomphé et c'est dans ce droit que j'ai inscrit notre combat.

 
De part nos siècles d'Histoire commune, tout ce qui fait la spécificité savoisienne s'applique à Nice. C'est pourquoi, si les Niçois le désirent, la renaissance de la Savoie sera également celle de Nice! En me rejoignant dans mon combat et en joignant ses forces aux miennes pour en faire le combat des Niçois et des Savoisiens, Alain Roullier-Laurens a tracé un chemin pour les Niçois. La journée du 24 mars 2010 fut un aboutissement. L'aboutissement des impressionnants travaux qu'il consacra à Nice, sa ville, son pays, sa terre qu'il aimait par-dessus tout, et également l'aboutissement de son œuvre militante auprès de tous ceux qui l'ont aimé, suivi et soutenu.


Alain a tracé le chemin puis il l'a quitté pour entrer dans l'Histoire. Ce chemin, nous aurions tous voulu le poursuivre avec lui, mais cela ne sera pas. Seul son souvenir marchera désormais à nos côtés. Le souvenir d'Alain Roullier-Laurens désormais gravé au cœur de tous les Niçois dignes de Nice et épris de sa glorieuse Histoire, le souvenir d'Alain à jamais gravé au cœur de tous ceux qui honoreront sa mémoire en suivant le chemin qu'il a tracé vers la liberté !



Jean de Pingon. Fondateur de la Ligue Savoisienne, Président d'honneur de la LRLN.

 

 

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